Élections
générales
le
7
avril
2014
Les enjeux dans
cette élection
Selon les candidats du PMLQ
Le
renouvellement des arrangements constitutionnels: le voleur qui crie
«Au voleur!»
Fernand Deschamps
candidat du PMLQ dans St-Laurent
Le lundi matin 31 mars, lors de sa conférence de
presse quotidienne, le chef du Parti libéral du Québec,
Philippe Couillard, s'est inspiré d'un article publié le
matin même dans le journal La Presse, détenu par
le monopole Power Corporation. Il a commencé par dire que
l'article intitulé « Le choc, la charge, la charte »
prouve sans l'ombre d'un doute une « machination calculée
» par le PQ pour « créer une crise sociale »
au Québec qui conduirait à une « confrontation
» avec le gouvernement fédéral, résultant
dans une impasse juridique qui « fournira des munitions pour la
cause souverainiste ».
Interrogé par des journalistes pourquoi il y
voyait un problème au fait que le PQ mettrait de l'avant une
stratégie pour gagner les Québécois à
l'idée de la souveraineté, il a écarté la
question en disant qu'il n'y a pas de problème que des partis
fassent valoir ouvertement leurs idées souverainistes, mais que
la façon dont cela est fait en « créant une crise
sociale » sur la question de la Charte des valeurs est «
inacceptable » parce que c'est une « machination
machiavélique » et qu'il n'a « jamais de sa vie
politique rien vu d'aussi cynique que cela ».
Eh bien, il semble que le docteur Couillard a quelques
trous de mémoire sur le passé récent et moins
récent de la politique québécoise. Se
rappelle-t-il de la façon dont, en 1995, lors du
référendum tenu au Québec, les libéraux de
Jean Chrétien se sont assurés que les résultats
soient en faveur du Non ? La Commission Gomery a exposé une
série de manigances que les libéraux de Jean
Chrétien ont utilisées pendant et avant le
référendum pour acheter des votes et influencer
l'électorat, ce qui a culminé la veille du
référendum par le fameux « love-in »
organisé à Montréal sous le thème «
Mon Canada inclut le Québec ». En quoi cela est-il
différent d'une « machination calculée » ?
Peut-il se porter garant que son parti n'est pas derrière
l'hystérie créée récemment autour du mot
« référendum », et largement promu par
lui-même et ses candidats durant les deux premières
semaines de cette élection ?
Où se situe-t-il sur la question de la «
Loi sur la clarté » adoptée en 1999 par le
parlement canadien sur ce qui constitue une « majorité
acceptable » aux yeux du gouvernement fédéral
advenant un autre référendum au Québec ? N'est-ce
pas un prétexte pour organiser une « crise sociale »
en ayant le gouvernement fédéral qui déclare
illégitimes les résultats d'un autre
référendum, créant ainsi les conditions pour
invoquer la Loi sur les mesures de guerre ? Comment est-ce
que Couillard peut garder le silence sur le fait que certaines forces
dans le reste du Canada discutent ouvertement dans les médias de
l'organisation d'un « référendum préventif
pancanadien » pour arrêter toute nouvelle initiative par le
gouvernement du Québec de tenir un autre
référendum ? N'est-ce pas une « machination
calculée ». Nous avons affaire ici au voleur qui crie:
« Au voleur ! ».
Ce que le peuple doit se rappeler, c'est que le Parti
libéral du Québec s'est opposé à
l'idée d'un référendum qui place au coeur des
discussions la volonté du peuple d'affirmer sa
souveraineté. Discuter ensemble de l'avenir du Québec va
à l'encontre tout ce que les libéraux représentent
aujourd'hui, qui est le statu quo constitutionnel, soit le maintien des
arrangements qui datent de l'époque des bâtisseurs
d'empire coloniaux du XIXe siècle.
Aujourd'hui, ces sont ces mêmes dispositions
constitutionnelles qui donnent la légitimité juridique au
gouvernement Harper et aux gouvernements des provinces et du
Québec d'utiliser le plein poids du pouvoir exécutif
et/ou de leur majorité au Parlement pour mettre en place ou
décréter de nouveaux arrangements au sein de
l'État qui favorisent les intérêts privés
des monopoles. Cela se fait aux dépens du bien public, en
opposition à la volonté du peuple qui veut la garantie
des droits individuels et collectifs dans le cadre d'une
société moderne. Par exemple, il n'est pas surprenant que
les libéraux de Charest et maintenant sous Couillard promeuvent
encore plus la privatisation du système de soins de santé
comme le soi-disant remède à la crise dans laquelle ils
nous ont eux-mêmes plongés.
Le parti libéral a montré maintes et
maintes fois qu'il est coincé dans ses anciennes façons
de créer des crises pour maintenir un statu quo constitutionnel
qui étouffe autant la nation québécoise que le
reste du Canada. Au contraire, nous avons besoin d'occuper l'espace du
changement nous-mêmes en mettant sur pied des commissions sur
l'avenir du Québec.
En marge du débat sur
l'exploitation pétrolière au Québec
L'important rôle géostratégique de
l'île d'Anticosti
- Fernand Deschamps, candidat du PMLQ dans St-Laurent -
Le gouvernement du Québec a
récemment annoncé qu'il va participer au financement
d'une partie de l'exploration pétrolière sur l'île
d'Anticosti afin d'en évaluer le potentiel en hydrocarbures. Il
dit entre autres que si ce potentiel en hydrocarbures est aussi
prometteur qu'on le dit, le Québec pourra envisager
l'autosuffisance en pétrole plutôt que d'importer ce
pétrole de l'extérieur, le Québec important
présentement son pétrole en grande partie de pays comme
l'Algérie et le Venezuela. Le type de pétrole qui sera
extrait de l'île d'Anticosti est un pétrole obtenu par
fracturation hydraulique, similaire à celui extrait au Dakota du
Nord et qui a transité par le Lac-Mégantic, avant la
tragédie de juillet 2013.
L'île d'Anticosti est située à
l'embouchure du fleuve St-Laurent, qui est la plus grande voie
navigable en Amérique du Nord pour les vaisseaux
transocéaniques et qui mène au coeur du continent
nord-américain. Elle est située de part et d'autre de la
péninsule gaspésienne et de la Côte-Nord. De par sa
position géographique, elle domine l'accès au fleuve
St-Laurent. L'histoire du XXe siècle a montré qu'en cas
de conflit militaire à l'échelle mondiale, le fleuve
St-Laurent et plus particulièrement son embouchure devient un
endroit de prédilection pour des sous-marins car de là
ils peuvent intercepter des navires qui transitent vers
l'intérieur du continent. L'île d'Anticosti a toujours
été convoitée pour ses ressources naturelles, mais
aussi pour sa position géostratégique d'un point de vue
militaire.
Page d'histoire
À partir de la première
période de la colonisation française, Anticosti a
été considérée comme importante pour la
sécurité de la colonie. Louis Jolliet a acquis
l'île en 1680 et, jusqu'au XXe siècle, divers colons et
entrepreneurs y ont tenté sans grand succès des
activités telles que la pêche, le piégeage
d'animaux, l'exploitation forestière et des entreprises
agricoles. Le plus célèbre d'entre eux fut Henri Menier,
qui a acheté toute l'île en 1896 et tenté de mettre
en place une forme de seigneurie sur laquelle il avait prévu,
entre autres, exploiter la capacité du bois de l'île pour
en faire de la pâte à papier. L'entreprise a toujours
été précaire et quand Menier est mort en 1906,
elle s'est rapidement effondrée.
En 1918, lorsque les activités de sous-marins
allemands au large de la côte nord-américaine ont fait des
ravages dans le cadre de la première grande guerre, la question
de la défense de l'île a été soulevée
par le capitaine Martin-Zédé, le directeur
général de l'île d'Anticosti, mais le
Secrétariat naval de l'époque avait
considéré que la menace était minime et aucune
mesure n'a été prise. Deux décennies plus tard, la
question a ressurgi de nouveau, mais de façon beaucoup plus
dramatique.
En 1926, Gaston Menier, l'héritier de Henri
Menier, a vendu l'île à la Wayagamack Pulp and Paper
Company. La société forestière a
prospéré jusqu'à ce que le marché du papier
se soit effondré au début de la Grande Dépression.
Dans le cadre de la restructuration de l'industrie au Canada, qui a
suivi la crise économique de 1929, la Consolidated Paper
Corporation Limited a été formée en 1931 et a pris
en charge l'île d'Anticosti.
Toutefois, les opérations sur l'île n'ont
été maintenues à flot qu'en accueillant des
touristes et des expéditions de pêche sportive. La
Consolidated Paper s'est dite prête à vendre l'île
et à accepter des offres provenant d'intérêts
canadiens, américains, britanniques, français et belges.
L'offre qui a surtout provoqué une controverse est celle qui fut
faite à l'été de 1937.
Une option d'achat de l'île, obtenue par un
financier montréalais le 29 juillet 1937, a été
transférée à Alois Miedl d'Amsterdam. Cet automne
de 1937, une équipe d'enquête de treize Allemands se sont
rendus sur l'île afin d'examiner les installations
forestières et portuaires pour l'exportation du bois. Ils ont
mené une enquête approfondie, prélevé des
échantillons de bois sur une période de plusieurs
semaines et ont quitté l'île assez soudainement, laissant
sur place certains de leurs biens.
Dans un article paru le 2 décembre 1937 dans le Montreal
Gazette, on apprenait que l'équipe de « scientifiques
» allemands venue sur l'île d'Anticosti à l'automne
de 1937, prétendument pour y mener une enquête sur les
ressources en bois, était en fait composée «
d'officiers militaires et navals », à la solde du
gouvernement nazi allemand. L'auteur de l'article, un
dénommé William Glyn, a demandé d'être
entendu par le gouvernement canadien. À l'époque, les
libéraux formaient le gouvernement à Ottawa sous la
gouverne du premier ministre Mackenzie King, un admirateur bien connu
d'Hitler qu'il avait même rencontré personnellement en
Allemagne.
L'équipe
de
«
chercheurs
» allemands venue à Anticosti à
l'automne de 1937 « explorer les ressources forestières
»
de l'île. On a soupçonné qu'ils étaient des
officiers militaires. (photo: Robert H. Thomas)
Le consortium représentant les
intérêts belges, néerlandais et allemands qui ont
voulu acheter l'île d'Anticosti représentait des usines de
pâtes et papiers situées en Belgique, au Pays-Bas et en
Allemagne, la majorité des usines étant en Allemagne.
Leur argument pour posséder l'île est que cela allait
fournir du bois qui serait exporté vers les usines d'Europe pour
faire de la pâte, la matière première pour produire
du papier à écrire et du textile. Selon eux, le Canada
tirerait un avantage de cette transaction financière
évaluée à 15 millions $ et le projet permettrait
la création de 2500 emplois dans une région
économiquement désavantagée. Lors de
l'assemblée des actionnaires de la Consolidated Paper du 27
avril 1938, le président de la compagnie, un
dénommé Belnap, a recommandé la vente de
l'île au consortium européen, répétant les
mêmes arguments économiques que le consortium investirait
jusqu'à 14 millions $ d'ici 1942, créant 2000 emplois
durant le développement et 5000 à 6000 emplois durant les
opérations.
Depuis l'occupation allemande de l'Autriche le 11 mars
1938 et même avant, plusieurs personnes ont commencé
à soulever des préoccupations face à l'achat
possible de l'île d'Anticosti par des intérêts
néerlandais et allemands, dont le député des
Iles-de-la-Madeleine au parlement de Québec, H.D. Langlais, qui
a même écrit au ministre de la Défense du Canada
lui suggérant l'achat de l'île par le gouvernement
canadien. Plusieurs personnalités politiques dont un membre du
Congrès américain ont écrit aux
représentants du gouvernement canadien pour exiger une
réponse à la question suivante : est-ce que l'île
d'Anticosti peut être aménagée pour être
utilisée comme une base militaire navale ou aéroportuaire
?
Le gouvernement allemand s'est officiellement
mêlé au débat lorsqu'en avril 1938 le
président du conseil du cabinet prussien, le maréchal
Herman Goering, a écrit au premier ministre Mackenzie King le
rassurant par ces paroles : « Cette proposition est de nature
purement économique et le seul but du consortium est la
production de bois d'oeuvre. Toutes les rumeurs d'atteinte aux
prérogatives et droits souverains ou d'ouvrages de nature
militaires sont pure fantaisie. »
Aux questions et préoccupations des
députés de la Chambre des communes, le premier ministre
Mackenzie King a rappelé qu'un traité commercial avait
signé entre l'Allemagne et le Canada et qu'il fallait le
respecter, que l'embargo que certains réclamaient sur
l'exportation de bois vers l'Allemagne serait illégal. En
même temps, Mackenzie King savait que l'Assemblée
législative du Québec avait passé une loi
interdisant l'exportation hors du Québec de produits forestiers
non transformés.
RECEVOIR
PAR
COURRIEL
Pour recevoir gratuitement Chantier
politique par courrier
électronique,
écrivez à abonnement@pmlq.qc.ca
|
|
Toutefois, la signature du traité de Munich le 29
septembre 1938 par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste, d'une part,
et la France et l'Angleterre d'autre part, a ouvert la voie à la
division de l'Europe par ces grandes puissances et l'occupation de la
Tchécoslovaquie et de l'Albanie en mars et avril 1939, suivie de
l'invasion de la Pologne en septembre 1939. À partir de ce
moment, la question de la vente de l'île d'Anticosti a
été reléguée aux oubliettes. C'est durant
le printemps et l'été de 1942, au milieu de la
Deuxième Guerre mondiale, que des sous-marins allemands ont
coulé de nombreux vaisseaux entre la Gaspésie et les
l'île d'Anticosti. On a alors vu pourquoi l'île
était si convoitée.
Référence
« The German Attempt to Purchase Anticosti Island
in 1937 », Robert H. Thomas, capitaine à la retraite, Canadian
Military
Journal, printemps 2001, pp. 47-51